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Photo du rédacteurJulien Gaüzère Auteur

Sur le lac Caribou (Chronique #117)

Dernière mise à jour : 17 nov. 2020



8 Août 2017,

Je me souviendrai toujours de cette première journée à l'école forestière de La Tuque en Protection de la Faune. Cette journée d'août, chaude et ensoleillée. Nous avons tous appris à faire connaissance, les uns, les autres. J'avais le coeur léger, j'entreprenais quelque chose d'unique que beaucoup qualifieraient d'irrationnel ou de dingue. Pourtant pour ce premier jour, dans mon canot au fil de l'eau, je sais que je suis exactement au bon endroit... Là où mon coeur a toujours voulu me conduire.


Ne vous est-il jamais arrivé de vous sentir chez vous à un endroit précis ? Un endroit jusque là inconnu. Un endroit que vous découvrez, mais qui semble exister depuis tant d’années dans vos pensées ?


C’est exactement la sensation que j’ai eu aujourd’hui sur les abords du lac Caribou.

Sur mon canot, je suis si peu de chose face aux étendues de forêts qui nous dominent. Seul dans mon embarcation, je me laisse porter par les courants chaud de l’été. J’admire le soleil qui parait plus lumineux sur les eaux que dans les airs. J’ai le sentiment d’être exactement là où la vie voulait me conduire. J’observe les libellules qui survolent les bords rocailleux. La vie est douce et simple sur le lac Caribou. Il y a tant de choses à y voir pour ceux qui s’en donnent la peine.


J’ai la sensation de tout découvrir, de voir le monde avec un regard neuf… Je garde en moi le sentiment d’être déjà venu par ici. Je l’ai tellement attendu, rêver, espéré mon lac Caribou. Je l’ai dessiné dans mes nuits tourmentées, je l’ai idéalisé derrière le comptoir monotone de ma boutique. Alors, aujourd’hui, j’ai simplement l’impression d’être à la maison… A l’endroit précis où mon coeur désirait se trouver.


En donnant des coups énergiques de pagaie, je file sur l’eau, j’épouse les angles du lac, ses arrondis, ses berges et ses herbes hautes. Je respire l’air généreux de la forêt Latuquoise. Ici, sur le lac Caribou, vous n’entendrez que les chants essentiels de notre monde. Les parades amoureuses des Geais-bleus, le croassement des ouaouarons et les chamailleries des écureuils roux… Le tout accompagné par le doux son des eaux calmes d’un mois d’août.


Entre quelques tours de canot, nous commençons à faire connaissance les uns, les autres. Nous allons vivre tant de choses ensemble. Même si cette journée paraît simple et sans artifices, nous avons pleinement conscience qu’elle restera un souvenir fort de notre formation : Le point de départ. Nous sommes encore timides et réservés mais nous écrivons déjà les pages d’une belle complicité à venir.


Je me sens bien, libre et plus fort qu’hier. Sur le lac Caribou, je comprends enfin que quelque chose d’important est en train d’émerger en moi. Après tant de combats et de volontés parfois incomprises, je suis là… Enfin là, loin de tout ce que je ne voulais plus et au plus près de l’essentiel. Je suis si peu de choses sur ce lac. Malgré tout je me sens important... je m’écoute enfin.


J’aurai pu rester des heures sur les eaux, à simplement regarder la nature me jouer son spectacle, à méditer et imaginer les mois à venir ici, à La Tuque et à l’école forestière. Aucun nuage ne semble poindre à l’horizon… A croire que les jours prochains seront tout aussi heureux que cet après-midi de canot sur le lac Caribou. Je ne regrette pas mes choix, je remercie même la vie, mon audace et ma persévérance de m’avoir conduit jusqu’au Québec.


Ne vous est-il jamais arrivé de vous sentir chez vous à un endroit précis ? Un endroit jusque là inconnu, que vous découvrez mais qui semble exister depuis tant d’années dans vos pensées ?


C’est exactement la sensation que j’ai eu aujourd’hui pour ma première journée d’école sur les abords du lac Caribou. Sur mon canot, je suis bien peu de choses face aux étendues de forêts. Peu de choses… et cela fait du bien de s’en rendre compte.

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